Le 24 octobre 2023, la 51e session plénière du Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA) a accueilli un événement parallèle intitulé “Gouvernance des données dans la numérisation du système alimentaire – Rapprocher les petits producteurs alimentaires et les gouvernements”. Cet événement parallèle a été organisé conjointement par le groupe de travail sur les données du Mécanisme de la société civile et des peuples autochtones (MSCPA), le rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l’alimentation, Michael Fakhri, et le gouvernement du Mexique.

Animé par le rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à l’alimentation, l’événement a eu lieu le jour même où les recommandations politiques du CSA sur le renforcement de la collecte et de l’utilisation des données relatives à la sécurité alimentaire ont été soumises à l’approbation et approuvées par les États membres lors de la session plénière du CSA. Vous trouverez ci-dessous un résumé de l’événement, qui comprenait un panel d’orateurs et oratrices très varié : Taina Hedman, du Conseil international des traités indiens (Panama), Patti Naylor, de la National Family Farm Coalition (NFFC, États-Unis), Moayyad Bsharat, de l’Union of Agricultural Work Committees (UAWC, Territoire palestinien occupé), Nosipho Nausca-Jean Jezile, nouvelle présidente du CSA et ambassadrice de la République d’Afrique du Sud en Italie, et Victor Suárez Carrera, vice-ministre de l’autosuffisance alimentaire (Mexique).

Michael Fakhri, défenseur d’un cadre de gouvernance robuste pour les données, a entamé l’événement en reconnaissant les récentes négociations du CSA comme étant parmi les premières discussions sur ce sujet au sein du système des Nations unies. Il a souligné que les discussions sur la technologie se concentrent souvent sur les opportunités commerciales, laissant de côté les dynamiques de pouvoir sous-jacentes.

Moayyad Bsharat, le premier intervenant, n’a pas pu se rendre à Rome depuis le territoire palestinien occupé, bien qu’il ait obtenu un visa. Comme l’a souligné Moayyad, pour les peuples colonisés tels que les Palestiniens, les données sont souvent contrôlées par le colonisateur et utilisées comme outil d’oppression. Les données sont rarement neutres et ont souvent des implications politiques importantes. Cela est particulièrement évident dans les technologies déployées et contrôlées par les entreprises israéliennes. Par exemple, les autorités de l’occupation israélienne utilisent la digitalisation pour surveiller les travailleurs et travailleuses sur le terrain, violant ainsi leurs droits humains. Il a également mis en garde contre les risques de la privatisation de l’information, qui en fait un outil pour attirer des investissements qui concurrencent les petits exploitants agricole et les agriculteurs et sont utilisés pour les expulser du secteur agricole.

S.E. Mme Nosipho Nausca-Jean Jezile a déclaré que les bénéfices des données et des technologies numériques doivent être restitués à ceux dont les données sont extraites. Elle a donné un exemple. En Afrique du Sud, il existe un cadre juridique appelé “Accès et partage des avantages”, qui est conforme au protocole de Nagoya. Ce cadre vise à garantir une distribution juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques, telles que les plantes indigènes à des fins médicinales – une pratique courante en Afrique du Sud. Ce cadre reconnaît les connaissances indigènes pour permettre l’innovation. Ainsi, tout au long de la chaîne de valeur, il y a un bénéfice réciproque qui se répercute sur les dépositaires de ces connaissances indigènes.

Taina Hedman, de la communauté Kuna Yala au Panama, a fait part de son point de vue en tant que personne issue d’une communauté autochtone. “Nous, les communautés autochtones, avons tous les pouvoirs. Nous sommes le centre de l’information”, a-t-elle déclaré. “Le pouvoir mondial veut nous arracher le savoir, alors que c’est nous qui détenons l’information.” Elle a réfléchi à la notion selon laquelle les données ne sont pas uniquement confinées dans les limites du contrôle des entreprises, puisqu’elles existaient bien avant l’ère de la numérisation. Les peuples autochtones sont depuis longtemps les gardiens des données, sauvegardant leurs connaissances ancestrales. Ces connaissances ont été documentées et protégées pour le bien de la Terre mère et de l’humanité”, a-t-elle conclu.

Patti Naylor, une petite exploitante agricole des États-Unis, a évoqué les aspects néfastes des technologies numériques pour les petits exploitants agricoles, citant l’extraction et l’exploitation de leurs données et de leurs connaissances par les entreprises, la surveillance et les violations de la vie privée, ainsi que les menaces potentielles de déqualification ou de remplacement pur et simple de la main-d’œuvre. Elle a également reconnu que les technologies normalisent un système d’agriculture extractive. La souveraineté nationale sur les systèmes de production et de distribution alimentaires est essentielle à la sécurité alimentaire, et la gouvernance des technologies de données doit donc être mise en place.

Víctor Suárez Carrera a souligné l’importance d’un accès équitable aux technologies. Il a mis en exergue une dure réalité : une grande partie de la population rurale du Mexique n’a pas accès à l’internet, ce qui a incité le gouvernement à adopter un objectif ambitieux consistant à fournir à 95 % des communautés rurales un accès gratuit aux télécommunications et à l’internet. Le contrôle des technologies est également une préoccupation du gouvernement mexicain. M. Carrera a exprimé son scepticisme quant aux avantages des technologies numériques, y compris le Big Data, l’automatisation et l’IA, présentés comme une panacée pour l’insécurité alimentaire mondiale – une affirmation qu’il considère comme une autre fausse promesse.

Michael Fakhri a résumé le débat et les questions complexes et interdépendantes abordées. Il a déclaré que nous pouvons considérer les données et les connaissances comme des ensembles différents de relations qui produisent des manières différentes de comprendre le monde. La connaissance s’appuie sur le contexte du moment. En revanche, les données proviennent d’un ensemble différent de relations où nous ne savons pas toujours avec qui nous avons à faire. “C’est abstrait”, a-t-il expliqué, “comme s’il y avait une machine qui aspirait nos expériences et les reconditionnait d’une manière à laquelle nous n’avions pas accès”. Il a fait écho aux propos de Taina en rappelant que le droit des peuples autochtones au consentement préalable, libre et éclairé n’est pas seulement reconnu dans la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Il est profondément ancré dans leur droit à l’autodétermination et fait partie intégrante de leur identité.

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Voir l’enregistrement vidéo de l’événement (en anglais et en espagnol)

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